Wandering

C’est étrange. De tous les lieux de ce monde, il a fallu qu’il revienne ici.

Il lève les yeux vers l’imposante arche de pierre, la regarde quelques instants pensivement, et redescend sur les terres dévastées en arrière plan. Il y a mieux comme endroit où retourner. Ou peut être pas. Pas dans son cas. Il n’avait que deux endroits où retourner, l’un est inaccessible, et l’autre… il l’a fait brûler de ses mains.

Que reste il de cette époque ? Quelques cendres et des souvenirs… dont une partie terrée dans l’ombre de ces ruines.

Pourquoi revenir ici, maintenant ? Il n’appréciait pas les Parias, ils se contentaient de travailler ensembles à l’occasion. La perspective d’une date limite à leur collaboration rendait leur arrogance plus supportable. Le vampire doit certainement toujours traîner ses oripeaux dans le coin… il n’a pas envie de le voir. Pas envie de parler, ou d’entendre des jacasseries. Dans un sens, ce lieu est bien choisi.

Il laisse le paysage et s’avance dans la nécropole. C’est reposant de n’entendre que le bruit de ses pas résonner sur les murs délabrés. Il est certainement plus serein qu’il ne l’a jamais été au cours de ces derniers mois. Une sorte de détachement apaisant.

Il sait ce qu’il est venu trouvé. Oui, au final il n’y a qu’une seule chose qu’il pouvait venir trouver en ces lieux. Mais c’est idiot… cela fait tellement longtemps. Et aux dernières nouvelles, il n’était même plus vivant.

Le voilà devant le tombeau. Il observe la façade quelques instants, comme il avait regardé l’arche un peu plus tôt, et reprend sa marche avec un petit sourire flottant sur ses lèvres. Il s’enfonce dans le tombeau avec cette démarche tranquille et légèrement négligée qu’il avait à l’époque.

L’air est froid, chaque souffle de sa respiration forme un petit nuage. Ca lui ressemble. Un petit sourire se dessine à cette pensée. Il sort une main gantée de sa poche droite, et la laisse glisser sur le mur glacé du souterrain à la mesure de ses pas. Il n’a pas besoin de lumière, ses yeux de felys sont là pour percer les ténèbres. Mais ils ne sont pas d’une grande aide pour trouver un chemin dans un labyrinthe.

Errer pour l’éternité dans le dédale… voilà une idée peut reluisante. Mais c’est une façon comme une autre de la passer, son éternité. Et s’il se laissait guider par l’instinct, ou la chance ? ou les deux ? L’idée l’amuse.

Faisons comme cela.



Ce n’est peut être pas le chemin le plus direct, ou le plus rapide, mais le voilà. Sourire satisfait, et frémissement de moustaches.

Ci-gît Sieg Hart, le Seigneur Noir.

Ça lui ressemble. La salle aussi. Froide, glaciale et majestueuse, avec un brin de mégalomanie dans l’air.

Et vide.

Comment ça, vide ? Son sourire s’évanouit et il fronce les sourcils en s’avançant de quelques pas dans la salle. Pas la moindre trace d’un être vivant ou de ses restes. Il y a bien des chaînes, mais elles sont vides. Pourtant… il est au bon endroit, il en est certain.

Un léger frisson le parcourt. Pour l’heure il serait bien incapable de dire s’il s’agit de malaise ou d’excitation, mais quelque chose dans l’air a changé. Il lisse lentement ses moustaches de la main droite en réfléchissant.

Son pèlerinage dans ses souvenirs prend à présent une toute autre mesure. Une tournure bien plus intéressante… Une lueur éteinte se rallume dans son regard et deux petites canines pointent dans un sourire.

C’est dans l’air.

Il frémit. D’anticipation cette fois. Si les autres aussi se réveillent… Il se pourrait bien que ce monde devienne d’un coup bien moins ennuyeux.

Son sourire s’élargit et il tourne les talons pour repartir d’un pas rapide dans les souterrains. S’il ne se trompe pas, ils seront là-bas. Quelqu’un a dû s’inviter, et les réveiller. Il était temps.

Il se contentera d’observer, c’est plus intéressant.

Dans un premier temps du moins.